Perspectives gaz : quel scénario à horizon 2030 et 2035 ?

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portrait Antoine Monnet

Pouvez-vous nous présenter l’objectif du rapport Perspectives gaz ?

Précisons d’abord que ce rapport répond à une obligation réglementaire prévue par le code de l’énergie.  On demande aux distributeurs et transporteurs de gaz d’anticiper l’évolution des consommations et de la production des gaz verts pour les dix prochaines années. Cela permet de présenter à tous notre vision commune sur l’évolution du mix énergétique français à l’horizon 2035. Un mix qui devra nécessairement être moins carboné qu’aujourd’hui. Cette édition 2024 décrit ainsi un scénario compatible avec l’atteinte de l’objectif climatique européen Fit for 55 en 2030 et qui poursuit la décarbonation du gaz au-delà. 

Quels sont les principaux enseignements ?

On peut les résumer en 3 points : consommer moins, mieux et renouvelable. 

Du côté de la consommation on attend de nouveaux progrès en matière d’efficacité et de sobriété. Dans le secteur du bâtiment, il s’agit à la fois d’adopter des comportements plus sobres, et d’encourager au remplacement progressif du parc d’anciennes chaudières (l’un des plus importants en Europe) par des chaudières performantes et des équipements hybrides. Dans le même temps un socle important de clients gaz devrait se maintenir. C’est la tendance que l’on observe depuis 10 ans et encore aujourd’hui : les ménages restent nombreux à utiliser le gaz, et chacun à son échelle en consomme moins, avec des équipements plus efficaces. Dans l’industrie, le gaz reste aussi un pilier essentiel du mix énergétique, de nombreux procédés ne pouvant se passer de cette énergie. Dans la mobilité, le GNV et le bioGNV continuent de progresser, comme solution de décarbonation plébiscitée pour le transport lourd.

Du côté de la production, l’essor des gaz verts se poursuit. L’association Solagro rappelle à l’occasion de la publication du rapport que le potentiel de biomasse agricole est suffisant pour concrétiser l’ambition de la filière en matière de méthanisation. À l’horizon 2035, ce sont aussi les nouvelles filières de gaz verts qui prennent de l’importance. Pour concrétiser leur émergence à un rythme suffisant, des mécanismes de soutien doivent maintenant être mis en œuvre. Ensemble, tous les gaz verts peuvent ainsi représenter entre 40 et 45% du mix gazier de 2035, trajectoire compatible avec la cible d’un gaz 100% renouvelable en 2050 au plus tard.

En résumé, la consommation va baisser et la production va se verdir : ce sera au bénéfice de l’environnement. La sobriété et l’efficacité permettront aussi d’organiser la transition à un coût maitrisé pour les consommateurs. Et grâce au maintien du nombre de clients, les réseaux de gaz renforceront l’équilibre du système énergétique. Consommer moins et mieux ce n’est pas sortir du gaz, c’est décarboner tout en conservant un coût maitrisé et un mix énergétique équilibré. 

Quels sont les paramètres qui pourraient influer sur la réalisation de ce scénario ?

Des analyses dites de « sensibilité » ont permis de révéler l’influence de certains paramètres clés sur le scénario de consommation, à la hausse ou à la baisse. L’incertitude principale concerne les besoins de gaz pour la production d’électricité : des retards de mise en service de nouvelles EnR électriques ou une nouvelle indisponibilité du parc nucléaire comme en 2022, conduiraient à des besoins en gaz nettement revus à la hausse (potentiellement plusieurs dizaines de TWh). Une forte réindustrialisation ou un retard dans la rénovation thermique des bâtiments pourraient également limiter la réduction des consommations de gaz prévue en 2030 et en 2035.